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« Que tout le monde se dispute la gloire de se perfectionner dans l'art de bien dire, & vous verrez rouler un torrent de lumières qui sera le garant de notre liberté. »    Saint-Just  

RECHERCHES SUR L'ELOQUENCE

Études sur d’autres orateurs et sur les conditions matérielles dans lesquelles se déroulèrent les débats à la Convention nationale.

La force de l’éloquence dans la réflexion des critiques et des orateurs

Résumé : La notion de force oratoire est au cœur de la réflexion sur l’éloquence en ce que la valeur d’un discours dépendant de l’action qu’il exerce sur l’auditoire. Dans cette étude, nous avons voulu examiner la nature et la cause de la force oratoire en nous appuyant, d’une part, sur des ouvrages critiques de l’Antiquité ayant traité cette question et, d’autre part, sur la réflexion d’orateurs de la Révolution qui, tout en reconnaissant eux aussi la puissance de l’éloquence, ont adopté à son égard des positions opposées. Si les théoriciens s’accordent sur la puissance dont est capable la grande éloquence, les idées qu’ils s’en font diffèrent et même divergent. Pour Quintilien, la puissance de l’éloquence consiste à détourner les auditeurs de la vérité grâce aux techniques pathétiques. Cicéron, s’il accorde un rôle prédominant à l’émotion, fait de l’action conjointe du docere, du movere et du placere la condition de la plus grande force des discours. De façon plus précise, l’auteur du traité Du Sublime expose que le pathos n’annule pas l’argumentation mais l’accompagne afin de lui procurer l’énergie qui lui manque. Pour leur part, les orateurs de la Révolution ont très généralement condamné les effets pathétiques trop puissants y compris lorsqu’ils étaient, comme Mirabeau et Robespierre, des orateurs de premier plan capables de véhémence. L’éloquence qu’ils souhaitent voir dominer dans les Assemblées est une éloquence de la raison. On doit à Condorcet la critique la plus systématique de l’art oratoire, qu’il est allé jusqu’à considérer comme nocif pour les décisions politiques. À l’inverse, Saint-Just a fait dans ses discours l’éloge de l’éloquence et de sa puissance : pour lui comme pour le traité Du Sublime, les effets oratoires touchant la sensibilité n’empêchent pas que la raison prime dans les discours des grands orateurs, et ils permettent d’instruire les auditeurs les moins éduqués. Mais si l’éloquence possède une puissance indéniable,

il ne s’ensuit pas que les orateurs aient un pouvoir solide : le leur est au contraire dangereux, limité, et on ne saurait affirmer qu’ils maîtrisent, comme le laissent penser les rhétoriciens, l’effet de leurs discours.

 

Article publié dans Pouvoir de la littérature. De l’energeia à l’empowerment, Emmanuel Bouju, Yolaine Parisot et Charline Pluvinet (dir.), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2019, p. 79-88.

Les orateurs de la Révolution française dans l’iconographie du temps

Résumé : Cette étude présente un ensemble de sculptures, peintures et gravures révolutionnaires donnant à voir ce que fut la gestuelle et la physionomie à la tribune des orateurs durant la période 1789-1794. La première partie fait une grande place à Mirabeau mais envisage aussi l’action oratoire de Barnave, de Robespierre, de Marat et de Barère. La seconde partie s’intéresse à l’actio des orateurs s’exprimant ailleurs qu’à l’Assemblée, dans des clubs ou sur les places publiques.

Cet article constitue un complément à notre livre L’Éloquence de Saint-Just à la Convention nationale : un sublime moderne qui met en évidence (seconde partie de l’ouvrage, chapitres II, III et IV) ce qu’était, selon les critères du temps, une bonne gestuelle oratoire à l’époque de la Révolution française.

Pour citer cet article : Anne Quennedey, « Les orateurs de la Révolution française dans l’iconographie du temps », site Internet www.annequennedey.com, 2020, 13 pages.

Les salles de la Convention nationale : images et descriptions

Résumé : L’article étudie des textes et documents iconographiques permettant de se représenter les conditions dans lesquelles les députés à la Convention nationale débattirent et prononcèrent leurs discours. Sont successivement considérées la salle du Manège, aujourd’hui détruite, qui s’élevait à Paris dans le jardin des Tuileries, et la salle des Machines, également disparue, qui se trouvait dans le palais des Tuileries, entre les actuels pavillons de Flore et de Marsan. La Convention nationale siégea au Manège du 21 septembre 1792 au 9 mai 1793, puis dans la salle des Machines du 10 mai 1793 jusqu’à sa séparation, le 26 octobre 1795.     

 

Pour citer cet article : Anne Quennedey, « Les salles de la Convention nationale : images et descriptions », site Internet www.annequennedey.com, 2020, 15 pages.

Maximilien Robespierre et la classe de Rhétorique. Première et seconde parties

Résumés : Ces deux articles proposent une mise au point sur les années d’études de Robespierre et particulièrement sur l’enseignement qu’il reçut en Rhétorique au Collège Louis­-le-Grand, classe dans laquelle il fit ses premières armes oratoires.

Ses biographes ont porté des jugements contradictoires sur les succès scolaires du jeune Robespierre. Dans le premier article, nous revenons sur le cursus de l’élève Robespierre à Arras puis à Paris. Celui-ci rétrograda de deux classes lors de son entrée à Louis-le-Grand, ce qui paraît avoir été banal parmi les Boursiers en raison de formations initiales insuffisantes, et qui dans le cas de Robespierre a été facilité par son jeune âge. Les débuts de l’élève Robespierre ont été relativement laborieux, ainsi que le montre le palmarès du concours général pour les classes de sixième et de cinquième où il ne reçoit aucun prix. En revanche, il accumule les années suivantes les succès à ce concours, preuve d’une réussite scolaire brillante. Qu’il ait redoublé sa Rhétorique ne doit pas non plus être interprété comme le signe d’un niveau insuffisant : les meilleurs élèves faisaient en effet alors deux ans dans cette classe afin d’acquérir une meilleure maîtrise de techniques que Rollin, par exemple, juge impossible de maîtriser en une seule année.

Le second article porte sur la nature de l’enseignement de Rhétorique à l’époque de Robespierre. Cet enseignement peut être connu par les traités mais aussi par plusieurs sujets donnés au concours général au XVIIIe siècle que nous avons eu la chance de retrouver. En 1775, lorsqu’il obtint un deuxième prix de Vers latins, Robespierre composa sur un sujet intitulé « Éloge de la Justice ». Concernant les Discours français et latin et l’épreuve de Vers latins, les élèves semblent avoir rédigé leurs copies à partir d’un texte préalable : pour les Vers latins était fourni aux élèves un modèle en prose, et les « discours » sont d’abord un exercice d’expansion oratoire à partir de textes brefs au style terne appelés arguments. L’apprentissage de l’art d’écrire dispensé dans les collèges de l’Ancien Régime était donc essentiellement formaliste et artificiel, mais il procurait aux élèves une grande aisance et une sensibilité remarquable aux effets rhétoriques et à la beauté des discours. L’article s’achève sur des renseignements biographiques sur Louis-Pierre Hérivaux que Robespierre eut comme professeur de Rhétorique et des informations sur la vie quotidienne à Louis-le-Grand au XVIIIe siècle.

 

Articles parus dans le Bulletin de l’A.M.R.I.D., n° 41, mars 2007, et n° 42, juin 2007, 7 et 9 pages.

Marmontel orateur. Discours politiques de l’an V 

Résumé : Les discours politiques de Marmontel, ultime pan de l’œuvre de l’écrivain, n’ont que peu retenu l’attention de la critique. Ils présentent cependant un double intérêt : ils permettent de mieux apprécier l’évolution de sa pensée politique durant la période révolutionnaire que ne l’autorisent les seuls Mémoires, et ils apportent un éclairage sur la pratique oratoire qui s’étend du 9 Thermidor au 18 Brumaire, elle aussi rarement étudiée. Les deux interventions que Marmontel fit à la tribune des Anciens les 24 prairial an V (Rapport sur la manière de disposer des livres conservés dans les dépôts littéraires) et 2 thermidor an V (intervention sur la menace d’un coup d’État contre les deux chambres), son allocution du 24 germinal an V devant les électeurs de l’Eure et son discours non prononcé pour la liberté de culte montrent un même souci de défendre, dans la République directoriale, la cause du catholicisme et celle des émigrés. À cette fin, Marmontel intègre dans ses discours des stéréotypes langagiers (lexique, formules) de la Révolution ; surtout, il multiplie, dans ces textes à l’enjeu politique, les analyses morales, réalisant en particulier une criminalisation des révolutionnaires par un amalgame entre décisions politiques et délits de droit commun. Singulière par son choix d’associer morale et politique, l’éloquence de Marmontel possède également un ton caractéristique relevant de ce que l’écrivain, dans ses Principes d’éloquence, a nommé « l’insinuation », définie comme le « talent de ménager » les esprits. 

 

Publié dans Marmontel : une rhétorique de l’apaisement, Jacques Wagner (dir.), Louvain-Paris, Peeters, 2003, p. 65­-77.

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